Discussion avec MEK - DA VINCI+ : entre légitimité et expérience personnelle

shooting “toujours réparer ses potes” x @verlan.paris
MEK - DA VINCI+ est une artiste visuelle multidisciplinaire, DA et photographe. Originaire de Casablanca, elle développe sa patte artistique depuis l’enfance tout en multipliant ses techniques. Des arts plastiques aux arts visuels, en passant par la réalisation de street clips et de la photographie de concert, MEK+ a su toucher à tout. Derrière l’objectif de l’appareil photo qu’elle empruntait (à ses débuts) à son ami Mehdi, sont passés plusieurs grands noms de la musique francophone et marocaine : Laylow, Alkpote, MADD, Shobee, Ashe 22, Lyonzon, LETO, Luvresval… Autodidacte à 100% et en bon couteau-suisse, elle décide de faire ses débuts dans la Réalité Augmentée en 2019, en proposant des filtres sur son compte Instagram. Également créatrice de contenus, MEK+ partage ses projets et processus artistiques, mais aussi des VLOG et vidéos en tout genre sur son compte TikTok @davinci8888.

l'artiste MEK- DA VINCI+
Hello Women In Art, ici MEK - DA VINCI+ et aujourd’hui on va parler de la place des artistes maghrébins dans le milieu de l’art.
Je suis artiste visuel, principalement DA et photographe. Je fais également de la Réalité Augmentée, du graphisme ou encore du dessin. Durant mon parcours, j’ai cumulé des expériences de terrain dans plusieurs secteurs. J’ai fait de la réal de clip, participé à la réalisation d’interviews d’artistes pour un média, fait de la photo de concerts et d’événements…
J’ai aussi été sur les bancs d’une école de design et digital, dans laquelle je n’ai pas passé plus de quelques mois car je n’ai pas aimé mon expérience, avant d’entamer ma licence en Sciences Sociales. C’est à partir de mon passage dans cette école que ma réflexion a commencé à germer.

En débutant mes activités parallèlement à mes études, j’ai pu rapidement me rendre compte qu’en tant qu’artiste maghrébine, j’allais avoir plus de mal à m’imposer dans le milieu. Dans la réal de clip, ou de photos de concerts, je n’ai jamais vraiment sentie que ma présence était illégitime car j’étais maghrébine. C’était plutôt le fait que j’étais une femme, en l’occurrence la seule dans une équipe d’hommes. Le facteur maghrébine a commencé à jouer lorsque j’ai commencé à me construire en tant qu’artiste et à vouloir en faire une carrière.
Ici, je parle principalement du milieu des arts visuels, avec la photo et le dessin. Lorsque tu te présentes aux milieux de l’art en tant qu’artiste maghrébin, on attend de toi que tu représentes ta culture dans ce que tu fais. A vrai dire, j’ai l’impression qu’on ne verra en toi un artiste légitime qu’à partir du moment où on pourra orientaliser ton art, et ta personne. C’est comme si les artistes maghrébins n’avaient pour seul atout que leur maghrébinité, et qu’ils n’avaient pas le droit d’avoir une identité artistique qui leur est propre, au delà de leurs origines ou de leurs cultures. J’ai vite eu l’impression que pour me faire entendre, ou me faire voir par les autres, je devais commencer à m’orientaliser moi-même.

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Je suis une artiste qui est très fière de sa culture. Je la représente d’ailleurs avec grand plaisir dans plusieurs de mes créations. Cependant, ce n’est pas la première composante de ma patte artistique. Ce que je fais, je le fais avec le cœur, je m’exprime dans mon art. Mon instinct premier, mes idées premières, ne sont souvent pas en lien, du moins explicitement, avec ma culture. Quand je représente ma culture, je le fais consciemment. Et je n’ai pas envie d’être réduite à ça, seulement. Mon art, c’est moi avant toute chose. Ce que je fais artistiquement, c’est pour moi les seuls moments où je peux être libre de mes idées, d’être qui je suis, sans devoir me conformer à des normes ou à un protocole.
